Quelques nuages pour le Rafale

Le sommet sur la sécurité nucléaire, organisé à Washington les 12 et 13 avril, aura permis aux présidents Sarkozy et Lula de se rencontrer et d’aborder le dossier de la vente de 36 avions Rafale aux forces aériennes brésiliennes.

« Je suis confiant. Les choses progressent exactement comme on avait prévu que cela progresserait (…) On est parfaitement en ligne avec ce qui a été dit et fait il y a un an lors de mon voyage au brésil » a ainsi déclaré le locataire de l’Elysée lors d’une conférence de presse.

Certes, plusieurs signaux envoyés par le gouvernement brésilien semblent encourageants pour l’appareil développé par Dassault Aviation, en dépit du fait que la rapport d’évaluation des forces aériennes brésiliennes (FAB) l’ait placé en troisième position de ses préférences, après le Gripen de Saab et le F18 Super Hornet de Boeing.

Seulement voilà, la signature d’un accord de défense entre le Brésil et les Etats-Unis en marge du sommet de Washington – lequel a suscité moins de vague que celui passé entre les Américains et les Colombiens – laisse planer la menace d’un éventuel coup de Jarnac.

En effet, pour Jean Guisnel (Défense ouverte, Le Point), un accord de la même nature avait été conclu entre les Etats-Unis et le Maroc au moment où le royaume chérifien devait choisir entre le Rafale et le F16 pour équiper ses forces aériennes. La suite est connue : malgré un bon dossier, l’avion de Lockheed-Martin s’était imposé.

Cependant, la portée de cet accord de défense entre Brasilia et Washington est à relativiser, étant donné qu’il concerne au premier chef la lutte contre le narcotrafic et qu’il limite l’action des Américains. Et puis, étant donné qu’un des critères les plus importants dans cet appel d’offres concernant les avions de combat est le transfert de technologies, les Brésiliens n’ont sans doute pas oublié les pressions subies de la part des Etats-Unis au moment où il était question de vendre au Venezuela, en 2006, des Super Tucano d’Embraer, lesquels sont conçus avec des composants fabriqués par Boeing…

Toujours est-il qu’une inquiétude pointe chez les industriels français concernés par cette vente et le journaliste de l’hebdomadaire s’en est fait l’écho. Parmi ces derniers, « on se demande si la war room élyséenne, chargée du suivi de ce contrat, fait bien en ce moment tous les efforts nécessaires, alors que les Américains et les Suédois activent leurs réseaux, poussent leurs pions auprès de l’armée de l’Air et des dirigeants » écrit-il.

Plusieurs paramètres viennent alimenter cette inquiétude. Tout d’abord, le Conseil national de défense brésilien n’a toujours pas validé le choix du gouvernement en faveur du Rafale. Cette instance devait prendre une décision au début de ce mois. Ce qui n’a pas été fait mais qui le sera probablement en mai prochain.

Mais ce retard risque fort de repousser la signature du contrat après l’élection présidentielle brésilienne, ce qui, en fonction de la couleur politique du prochain homme fort du pays, pourrait contrarier la vente du Rafale.

Par ailleurs, et pour preuve que certains réseaux d’influence ont été activés par les concurrents de Dassault, le syndicat des métallurgistes, dont est issu le président Lula, a clairement affirmé sa préférence pour le Gripen suédois car, selon ses dirigeants, il permettrait la création de 28.000 emplois au Brésil.

Autre exemple : l’ouverture d’une enquête sur le processus de sélection du futur avion de combat brésilien, à la demande d’un particulier qui critique le choix du Rafale sur « le principe visant à réaliser des économies ». Cette procédure pourrait prendre un an et ne devrait pas être interrompue, même si le vainqueur de l’appel d’offres est connu entre-temps.

Sous d’autres cieux, l’achat du Rafale est également contesté au Koweit, par des parlementaires du Bloc islamiste. Ces derniers estiment en effet que l’avion de Dassault est trop cher et pas assez développé techniquement.

« La signature de la convention d’achat signifie que nous allons passer sur le grill celui qui est chargé d’autoriser l’opération » a ainsi déclaré le porte-parole de cette formation, le 11 avril dernier.

Depuis 2008, il est question que le Koweit achète entre 14 et 28 exemplaires du Rafale. Récemment, le ministre de la Défense, Cheikh Jaber Moubaral al-Sabah, a réaffirmé que l’acquisition des avions français était une « priorité » pour son pays.

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