La France maintient sa politique de dissuasion nucléaire

La Russie et les Etats-Unis ont signé, ce 8 avril à Prague, le nouveau START (Strategic Arms Reduction Treaty), un texte qui vise à réduire les arsenaux respectifs des deux pays.

Même le président Obama a parlé d’un « moment historique » au sujet de cette signature qui met un terme à des mois de négociations entre les deux parties, il n’en demeure pas moins que la portée ce nouveau traité est à relativiser.

D’une part, il n’est question que de réduire le nombre des armes stratégiques « opérationnelles », ce qui signifie que celles qui sont en réserve ne sont pas prises en compte, tout comme les armements conventionnels, et d’autre part, ce texte prévoit une clause de sortie pour les Russes si ces derniers estiment que leur capacité offensive est menacée par la défense antimissile américaine, que Washington compte déployer au sud de l’Europe, notamment en Roumanie.

Enfin, l’objectif de baisser le nombre d’armes nucléaires jusqu’à un seuil de 1.550 n’est pas plus ambitieux que celui fixé par le traité SORT (Strategic Offensive Reduction Treaty) signé en 2002 par Vladimir Poutine et George W. Bush.

Pour le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, le texte du START Follow on (tel le nom de ce traité) reste « très déclaratoire ». Le chef de la diplomatie française a également observé, lors d’une audition devant une Commission de l’Assemblée nationale, que « les décrets qui l’accompagneront ne sont pas publiés ».

« Un monde dans armes nucléaires (ndlr: comme le souhaite Barack Obama), cela ne va pas être pour tout de suite » a poursuivi Bernard Kouchner. « 95% des têtes – des armes avouées car il y a un certain nombre de dissimulations – appartiennent à la Russie et aux Etats-Unis. Nous avons entre 200 et 300 têtes nucléaires » a-t-il avancé.

Aussi, il n’est pas question pour Paris de modifier sa ligne de conduite en matière de dissuasion nucléaire. « Pour le moment, la France, qui n’est pas une nation belliciste, n’a pas changé sa politique et il n’est pas question qu’elle la change » a lancé le patron du Quai d’Orsay.

« Nous avons une force de dissuasion, elle n’attaquera jamais personne et pour le moment, nous la maintenons » a encore insisté Bernard Kouchner. Mieux même : la nouvelle doctrine nucléaire américaine, dévoilé le 6 avril, conforte l’attitude française au sujet de sa force de frappe.

Pour résumer, les Etats-Unis ont annoncé qu’ils n’utiliseraient pas d’armes nucléaires contre des pays qui en sont démunis et qui respectent les termes du Traité de non prolifération nucléaire (TNP), ce qui exclut de facto la Corée du Nord, qui en est sortie en 2003 et l’Iran, qui est accusée de ne pas s’y conformer.

Pour le ministère français des Affaires étrangères, cette posture « est convergente avec » les « vues » de Paris et confirme « la pertinence de la dissuasion nucléaire ». La doctrine française « strictement défensive, limite rigoureusement les cas dans lesquels les armes nucléaires peuvent être employées » a ainsi affirmé Bernard Valero, le porte-parole du Quai d’Orsay, lors d’un point-presse.

Pour Paris, « la dissuasion a pour but de garantir la sauvegarde de nos intérêts vitaux, contre toute menace d’origine étatique d’où qu’elle vienne et qu’elle qu’en soit la forme. L’emploi de l’arme nucléaire ne serait ainsi concevable que dans des circonstances extrêmes de légitime défense, droit reconnu par la Charte des Nations unies » a-t-il expliqué.

Enfin, Bernard Valero a rappelé que la France avait, en 1995, « donné des assurances de sécurité contre le recours ou la menace de recours aux armes nucléaires aux Etats non dotés de l’arme nucléaire parties au TNP », tout comme d’ailleurs les Etats-Unis. Ce qui donne un goût de réchauffé à la nouvelle doctrine nucléaire américaine…

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