Pour Washington, le temps de la réconciliation n’est pas encore venu en Afghanistan

Alors que le président Karzaï a engagé des pourparlers avec des responsables taliban, qui ont d’ailleurs été arrêtés au Pakistan, et que le Conseil de sécurité des Nations unies a encouragé Kaboul à trouver une solution politique pour mettre un terme à l’insurrection islamiste, le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, a estimé qu’il est encore trop tôt pour parler de réconciliation entre les différentes factions afghanes.

« Le changement n’est pas suffisamment rapide pour convainre les responsables taliban qu’ils sont en train de perdre » a-t-il déclaré lors d’une audience au Congrès, ce 24 mars. En fait, le chef du Pentagone pense que les efforts militaires accomplis jusque-là ne sont pas encore suffisants pour établir un rapport de force favorable au président Karzaï.

« Et c’est quand ils (ndlr: les insurgés) commenceront à avoir des doutes sur leur victoire qu’ils voudront conclure un accord. Je pense que nous n’y sommes pas encore » a ajouté Robert Gates.

Le chef d’état-major interarmées, l’amiral Mike Mullen, est également sur la même longueur d’onde que le secrétaire à la Défense. « Je m’inquiète du type d’espoir créé dans l’immédiat qui vous fait dire que lorsqu’il y a une petite lumière d’espoir, c’est que c’est bientôt la fin » a-t-il déclaré devant les parlementaires américains. « Je ne vous pas cela comme ça. C’est une partie difficile, très difficile du processus » a-t-il poursuivi.

Cette prudence américaine vient en écho à celle exprimée, le 23 mars, par l’Organisation de la conférence islamique (OCI), qui regroupe 57 pays musulmans. Ainsi, son secrétaire général, Ekmeleddin Ihsaoglu, a déclaré qu’il fallait « calculer avec prudence le retrait des troupes étrangères d’Afghanistan », à l’occasion d’une conférence de presse donnée à Islamabad.

« Nous ne devons pas recréer un exemple post-soviétique. Nous devons être prudents (quant au retrait) et cela doit se faire avec l’accord du peuple afghan et de toutes les parties prenantes. Sinon, cela aboutira à une nouvelle guerre civile, et il faut l’éviter » a-t-il encore estimé.

En attendant, les négociations entre le gouvernement afghan et le mouvement islamiste Hezb-i-Islami, qui a revendiqué l’embuscade d’Uzbeen où 10 militaires français avaient perdu la vie en août 2008, se poursuivent à Kaboul. Un des négociateurs de ce parti, Mohammad Daoud Abedi, a laissé entendre qu’il pourrait se satisfaire du calendrier de retrait américain dévoilé en décembre dernier par le président Obama.

« Il y a une formule : ‘Aucun ennemi n’est un ennemi pour toujours, aucun ami n’est un ami pour toujours' », a-t-il déclaré à l’agence de presse Reuters, ce 24 mars. « Si partir est ce que la communauté internationale sous la conduite des Etats-Unis prévoit de faire, nous ferions mieux de faire en sorte qu’ils puissent partir avec honneur » a-t-il dit, en indiquant qu’un cessez-le-feu avec les forces de l’Otan est « faisable », à condition que ce soit par l’intermédiaire du gouvernement afghan.

Les relations entre le mouvement taleb et le Hezb-i-Islami se sont tendues ces dernieres semaines et elles ont même été émaillées de combats dans le nord de l’Afghanistan au début de ce mois. « Nous n’avons en commun avec les taliban que l’exigence d’un retrait des troupes étrangères et la libération de notre pays de l’occupation » a fait valoir Mohammad Daoud Abedi. « Pour le reste, ils ont leurs opinions et nous les nôtres. Nous croyons à des élections libres et honnêtes et les taliban ont une idée différente » a-t-il ajouté.

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