Morin relativise le rapport de l’armée brésilienne sur le Rafale

Le Brésil souhaite acquérir 36 avions de combat pour une facture estimée à quatre milliards de dollars. Pour cet appel d’offres, trois appareils sont en lice :  le Rafale de Dassault Aviation, le Gripen NG de Saab et le F18 Super Hornet de Boeing.

En septembre dernier,  le chef de l’Etat brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva (« Lula »), a clairement indiqué sa préférence pour le dernier né de Dassault Aviation. Ce soutien s’est concrétisé lors de la visite officielle du président Sarkozy au Brésil, quelques jours plus tard. A l’issue d’une rencontre entre les deux hommes, l’annonce de l’ouverture des négociations entre le GIE (Groupement d’intérêt économique) Rafale et les autorités brésiliennes a été faite.

Deux raisons ont motivé cette décision : l’étendue des transferts de technologies proposés par la France, ainsi que l’engagement de cette dernière à acquérir 12 avions de transport et de ravitaillement KC390, développé par l’avionneur brésilien Embraer. De plus, et après la livraison des 36 appareils, Brasilia aurait également la possibilité de fabriquer des Rafale et de les vendre en Amérique du Sud. « Entre le Brésil et la France, il ne s’agit pas d’une relation de fournisseur à client, mais de partenariat » avait alors expliqué le président français à au journal O Globo.

Seulement voilà, les militaires brésiliens n’ont pas apprécié d’être mis devant le fait accompli et de se voir imposer un avion avant même que leur évaluation technique des trois appareils en lice n’était pas terminée. Par ailleurs, les relations entre le président Lula et son armée sont loin d’être au beau fixe, les militaires n’ayant pas apprécié le projet de création d’une commission d’enquête sur les crimes de la dictature militaire commis entre 1964 et 1985.

Cela étant, les conclusions de ce rapport de 30.000 pages, attendu depuis octobre, ont finalement été consultées par le quotidien Folha de Sao Paulo. Et comme l’on pouvait s’y attendre, les Forces aérienne brésilienne (FAB) ont placé le Gripen NG en tête de leur classement. Viennent ensuite le F18 Super Hornet et le Rafale. Parmis les arguments avancés par ce document, l’avion suédois serait le moins cher des trois à l’achat et aussi le moins coûteux à l’entretien. Quant aux transferts de technologies, les responsables des FAB estiment que le choix du Rafale ne serait pas des plus pertinents étant donné qu’il serait difficilement vendable à l’étranger et qu’il présenterait de faibles retombées technologiques et financières.

Ce classement n’est pas une surprise. En effet, les FAB a toujours manifesté sa préférence pour le Gripen, ce qui peut paraître curieux quand on sait que cet avion est monomoteur et qu’il devra survoler la forêt amazonienne où justement, il vaut mieux compter sur deux moteurs que sur un seul. Et puis il ne faut pas oublier la campagne de dénigrement dont le Rafale a fait l’objet au Brésil, ce qui a conduit Dassault à réagir en accusant ses concurrents de désinformation. « Malheureusement, nos rivaux ont commencé à faire des déclarations publiques qui ne correspondent pas à la réalité pour tenter d’influencer la décision » a affirmé, en novembre, Jean-Marc Merialdo, le directeur de la filiale Brésil de l’avionneur français, selon qui le prix du Rafale est « comparable à celui d’autres appareils de la même classe ».

Du côté des responsables politiques français, on se veut serein. Ainsi, le ministre de la Défense, Hervé Morin, a déclaré ne pas connaître le rapport des FAB cité par le Folha de Sao Paulo. « Ce sont des rumeurs d’un journal » a-t-il affirmé sur les ondes de RMC. « Vous êtes dans une compétition extrêmement dure et dans une compétition comme celle-ci, toutes les rumeurs sont mises sur la table par les uns et les autres » a-t-il ajouté.

Et pour le ministre voudrait « qu’on compare ce qui est comparable ». « Est-ce que, sans vouloir vexer personne, on peut comparer une Ferrari qu’est le Rafale et le Gripen qui est une voiture, pour prendre un exemple, une Volvo » s’est-il interrogé. « Le Rafale est le seul avion multimissions au monde (…). Le Gripen est un avion qui ne vole pasn qui n’existe pas, qui est seulement dans les bureaux d’étude du constructeur » a-t-il avancé.

Quant au choix qui sera fait par Brasilia, Hervé Morin a mis en avant « le partenariat industriel majeur » proposé par Paris qui permettra au Brésil « de constituer une plateforme industrielle aéronautique de premier plan sur l’ensemble de l’Amérique latine ». Et d’ajouter : « Nous sommes dans le cadre d’un partenariat stratégique avec le Brésil, qui est une partenariat politique, donc la décision sera politique ».

Et en effet, il reviendra au président Lula de trancher. On connaît sa préférence, le rapport d’évaluation des FAB n’étant que consultatif. « La décision finale est toujours politique » a confirmé, ce 6 janvier à Genève, le ministre brésilien des Affaires étrangères, Celso Amorim. « Evidemment, on va étudier, prendre en compte ce qu’il y a dans les rapports » mais « c’est au ministre de la Défense, au président de la République de décider » a-t-il poursuive. « Ce n’est pas une décision exclusivement militaire » a-t-il conclu.

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