Guérilla urbaine à Rio

« Il y a une différence fondamentale entre le policier et le militaire même si, c’est vrai, les deux risquent leur vie dans l’exercice de leur métier : la nature de l’adversaire. L’adversaire du policier est un délinquant qu’il doit neutraliser au nom de la société; celui du soldat est un homme qui, comme lui, est en charge du destin de sa nation et se bat pour son pays. Dans ce dernier cas, le niveau de violence peut atteindre un stade extrême », confiait le général Jean-Louis Georgelin, le chef d’état-major des armées (CEMA), au Figaro, le 12 juillet 2008.

Au vu des événements de Rio de Janeiro, il apparaît ainsi que la différence entre le métier de soldat et celui de policier tendrait à s’estomper. Ainsi, dans la nuit du 16 au 17 octobre, les membres du « Commando rouge », du gang de Sao Joao, ont attaqué leurs rivaux de la favela voisine de Morro dos Macacos (« la colline des singes »), non loin du célébre stade de Maracana, afin d’y établir leur domination territoriale. Histoire de régler le différend en « famille », les trafiquants avaient préalablement pris soin de bloquer les voies d’accès à la zone de combat pour empêcher une intervention policière.

Les échanges de coups de feu vont durer jusqu’au matin. Finalement, à 8h30, les forces de sécurité brésiliennes arrivent pour rétablir l’ordre, avant d’être à leur tour prise à partie par les narcotrafiquants qui n’ont pas hésité à abattre un hélicoptère de la police par des tirs de fusil mitrailleur. L’appareil, en flammes, s’écrase alors sur un terrain de football. Deux policiers sont tués sur le coup et quatre autres sont gravement brûlés. L’un d’eux décédera plus tard des suites de ses blessures.

Il aura fallu attendre l’après-midi pour que la situation redevienne calme. Au total, les affrontements ont fait 17 morts, dont trois policiers, ainsi que trois civils, victimes de balles perdues.

Cependant, il semblerait que la police brésilienne ait été au courant, sans pour autant y croire, de l’opération du gang de Sao Joao, grâce à l’écoute d’une conversation téléphonique de son chef, actuellement détenu dans une prison de haute sécurité dans l’Etat du Parana, dans le sud du pays.

Quoi qu’il en soit, près de 4.500 policiers, civils et militaires, restent mobilisés et ont été placés en état d’alerte dans leurs casernes, dans le cas d’une reprise éventuelle des affrontements entre les gangs rivaux. Le ministre brésilien de la Justice, Tarso Genra, a même proposer l’envoi de troupes d’élite de l’armée mais cette offre a été déclinée par Sergio Cabral, le gouverneur de l’Etat de Rio.

« Ce sont souvent des innocents qui payent et nous travaillons avec le gouverneur (…) pour améliorer la situation dans les favelas, pour réduite la violence » et « nettoyer la saleté » a commenté le président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva. D’autant plus que le temps presse : Rio accueillera la coupe du monde de football en 2014 et les Jeux Olympiques en 2016.

Toujours est-il que les gangs sont de mieux en mieux armés, grâce notamment à la nature même du Brésil, dont les frontières, difficiles à surveiller, sont propices à tous les trafics.

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