Vers un redéploiement des troupes en Afghanistan

« La culture de la guerre est telle qu’il est illusoire de croire que l’insurrection nous laissera la place sans que nous occupions réellement tout le terrain. Comme les forces armées, coalition et ANA (ndlr: Armée nationale afghane) comprises n’auront jamais qu’une capacité d’occupation temporaire ou partielle, il nous faut renoncer d’emblée à contrôler militairement toute la zone d’action ». a écrit le colonel français Chanson, le commandant du 3e Régiment d’Infanterie de Marine (RIMa) et le chef de corps du Groupement tactique interarmes (GTIA) Kapisa, dans un rapport RETEX (retour d’expérience).

« Les gains territoriaux sont invariablement remis en jeu la saison suivante lorsque les conditions sont à nouveau favorables aux insurgés ou lorsque la Froce, profitant de l’accalmie, offre à nouveau des vulnérabilités » explique encore l’officier. « L’idée est de ne pas aller chercher les rebelles sur le terrain le plus favorable à leur combat préférentiel mais de les attirer dans les zones qu’ils ne pourront pas tenir » poursuit le colonel Chanson, qui souhaite davantage mettre l’accent sur le développement et l’aide apportés aux populations civiles que de se focaliser uniquement sur l’aspect militaire de la mission.

« Il importe d’abord que l’objectif des engagements offensifs ne soit pas les destruction mais l’attrition (ndlr: l’usure) de l’adversaire et que notre supériorité technique soit valorisée lors de chaque affrontement » estime encore le chef du GTIA Kapisa. « Le procédé qui viserait à se rendre maître du terrain par l’élimination de l’adversaire est voué à l’échec » insiste-t-il, notamment en raison de l’étendue de la zone à contrôler, ramenée aux effectifs disponibles. « Sur le moyen terme, il n’y a pas de victoire militaire à attendre. C’est l’exploitation des combats qui fait les victoires et donc la perception qu’en a la population » conclut le colonel Chanson.

Dans le fond, le général américain McChrystal, le commandant de la Force internationale d’assistance à la sécurité (ISAF) et l’officier français font presque la même analyse sur la difficulté de « tenir le terrain ». En effet, dans son rapport « d’évaluation stratégique », remis au début de ce mois au général Petraeus et au secrétaire à la Défense, Robert Gates, le général McChrystal a préconisé que les forces déployées en Afghanistan soient concentrées « avant tout sur les zones fortement peuplées dans les insurgés cherchent à obtenir ou ont déjà le contrôle », quitte à ce que certaines régions faiblement peuplées subissent à nouveau la loi des taliban et plus généralement, des insurgés.

Patron de l’US Centcom, le commandement américain en charge des conflits irakien et afghan et par ailleurs lecteur du lieutenant-colonel David Galula, le « Clausewitz » de la contre-insurrection, le général Petraeus est du même avis que son subordonné. « Les deux tiers des attaques ont lieu dans seulement 10% des districts » a-t-il avancé, lors d’une conférence de presse donnée à Washington. « Une des approches est donc évidemment de concentrer notre effort dans les zones où l’insurrection représente la plus grande menace pour la population » a-t-il déclaré.

Par ailleurs, le général McChrystal devrait soumettre au secrétaire à la Défense, avant la fin de la semaine, une requête portant sur une augmentation des effectifs militaires déployés en Afghanistan. « Une fois qu’il l’aura (ndlr: Robert Gates), il attendra le temps qu’il faut pour que le président et ses équipes soient en situation de l’étudier » a précisé, le 23 septembre, Geoff Morell, le porte-parole du Pentagone.

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