Portrait du nouveau chef des taliban pakistanais

Après l’avoir dans un premier confirmée, puis niée, les taliban pakistanais ont fini par admettre la mort de leur chef, Baïtullah Mehsud, le 25 août. Ce dernier avait été la cible d’une frappe aérienne menée le 5 août par un drone américain alors qu’il se trouvait dans son fief du Waziristan Sud.

Ce sont deux responsables du TTP (Tehrik e-Taliban), le mouvement qui fédére une douzaine de formations islamistes, qui l’ont annoncé à l’agence Assiociated Press (AP). Histoire de ne pas se renier ou non, tant il est difficile de le savoir, les deux hommes ont précisé que leur chef avait succombé à ses blessures près de trois semaines après le raid. Précision qui a son importance : les deux dirigeants qui se sont ainsi exprimés sont Waliur Rehman et Hakimullah Mehsud.

Or, selon les services de renseignement pakistanais, ces deux hommes se seraient entretués lors d’une violente altercation qui aurait éclaté pendant une assemblée (choura) organisée juste après le raid fatal à Baïtullah Mehsud. D’ailleurs, la récente rencontre entre Waliur Rehman et un journaliste de l’AP dans un maquis du Waziristan Sud avait déjà de quoi faire douter les affirmations d’Islamabad au sujet de ce supposé incident.

Par conséquent, il y a donc tout lieu de penser que c’est bel et bien Hakimullah Mehsud qui a été désigné par une assemblée (choura), organisée le 22 août, pour succéder à Baïtullah Mehsud et que le nouvel homme fort du mouvement taleb pakistanais soit en mesure d’en assumer la direction, contrairement aux informations des services pakistanais.

D’autant plus que, selon la presse pakistanaise, Hakimullah Mehsud se serait autoproclamé chef du TTP et aurait ainsi forcé la main à la choura chargée de trouver un successeur à Baïtullah Mehsud. Et cela, quelques heures après qu’un autre dirigeant taleb, Faqir Mohammad, ait fait la même chose, avant d’être prié de rentrer dans le rang. Cela dénote, toutefois, une certaine confusion au sein de la hiérarchie du TTP, ou du moins l’existance d’une lutte d’influence pour avoir la haute main sur l’ensemble du mouvement.

Âgé d’une trentaine d’années, Hakimullah Mehsud aurait été le chauffeur de Baïtullah Mehsud, ce qui laisse penser que les deux hommes étaient proches. Ayant la réputation d’être un combattant intrépide, impitoyable et impulsif, il est aussi connu pour sa brutalité. A la tête de près de 8.000 combattants, Hakimullah Mehsud s’est attaqué à la communauté chiite, notamment dans la région d’Orakzai, qui est une de ses zones d’opérations, avec celles de Kurram et de Khyber.

Il serait aussi le responsable des attaques qui visent les convois de ravitaillement destinés aux troupes de la Force internationale d’assistance à la sécurité présente en Afghanistan, ce qui a amené l’Otan à trouver des voies logistiques alternative, notamment en trouvant des accords avec la Russie et d’autres pays d’Asie centrale.

Cela étant, il n’est pas encore acquis qu’Hakimullah Mehsud finisse par s’imposer à la tête du TTP. Comme on l’a vu, d’autres dirigeants, à commencer par Faqir Mohammad, ont ouvertement exprimé leurs intentions, avant de les taire. L’hypothèse que le mouvement taleb pakistanais puisse éclater n’est pas à écarter. Un des détonateurs pourraient d’ailleurs être l’appât du gain. En effet, sept membres de la belle famille de Baïtullah Mehsud, rescapés du raid, ont été arrêtés et exécutés par les hommes d’Hakimullah. Officiellement, ils étaient soupçonnés de trahison. Mais il se dit aussi, du moins selon le quotidien pakistanais Daily Times, que ce soit pour une autre raison : celle de cacher le trésor de guerre du chef défunt.

En attendant, le nouvel « émir » des taliban pakistanais a juré de venger la mort de Baïtullah Mehsud. Et cette menace n’a pas tardé à être mise à exécution puisque les taliban, par la voix d’un de leurs porte-paroles, Azam Tariq, a revendiqué l’attentat suicide qui a tué, le 27 août, 22 policiers et fait une vingtaine de blessés à Torkham, localité située sur le trajet de la passe de Khyber, empruntée par les convois de ravitaillement de l’Otan.

Le 30 août, au moins 14 autres policiers ont trouvé la mort dans une attaque suicide, commise dans l’enceinte du commissariat principal de Mingora, dans la vallée de Swat, où l’armée pakistanaise avait lancé une vaste offensive en avril dernier et qui a été déclaré terminée en juillet. Le même jour, un convoi de carburant destiné aux troupes de l’Otan déployées en Afghanistan, a également eté frappé par un attentat, cette fois perpétré dans le Balouchistan, au sud-ouest du Pakistan.

De leur côté, les forces de sécurité pakistanaises ont affirmé avoir arrêté, hier, une quarantaine de rebelles présumés au cours d’opérations menées dans les régions de Swat et de Malakand. Par ailleurs, suite à l’attaque de Mingora contre le poste de police, des accrochages ont opposé l’armée et les taliban. Ces derniers auraient perdu, selon Islamabad, une trentaine des leurs, principalement lors de frappes réalisées par des hélicoptères de combat.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]