A400M : EADS met la pression

Qui croire? Le président d’Airbus, Thomas Enders, qui lance lors d’un entretien avec l’hebdomadaire allemande Der Spiegel que l’avionneur ne peut pas construire l’A400M « dans les conditions actuelles », préférant « une fin qui provoque des cris d’orfraie que des cris d’orfraie sans fin » ou bien la direction d’EADS, la maison-mère, qui affirme au contraire « être pleinement engagé dans la construction » de l’avion de transport militaire.

En fait, ces déclarations semblent faire partie d’une stratégie visant à imposer les conditions du constructeur aéronautique européen à une partie de ses clients qui ont manifesté des signes d’humeur à l’annonce des retards successifs dans le développement de l’appareil. Le Royaume-Uni a ainsi fait part de son intention de trouver des « solutions alternatives » en cas de nouvel empêchement (en clair, Londres ira voir du côté de Boeing), l’Allemagne a également évoqué une annulation pure et simple de sa commande et la France pourrait réduire la sienne.

Le risque pour EADS, en cas de rupture du contrat, serait de rembourser à ses clients près de 5,7 milliards d’euros, ce que le groupe ne peut actuellement pas se permettre avec la demande en baisse de la part des compagnies aériennes confrontées à la crise, le lancement de l’A350 et la production de l’A380. L’enjeu, pour l’avionneur européen, est donc de trouver une issue favorable lors négociations concernant l’avenir de l’A400 M qui vont s’ouvrir au début du mois d’avril.

Déjà, EADS a obtenu un répit : la date à laquelle les clients de l’A400M pourront dénoncer leur contrat a été repoussé au 1er juillet prochain. Mais il reste donc à redéfinir le calendrier des livraisons, les différentes spécificités de l’appareil – chaque acheteur ayant les siennes, ce qui complique davantage le développement de l’appareil – et les pénalités de retard.

Ainsi, le groupe européen a fait valoir, dans son communiqué, que « le contrat signé en 2003 (d’un montant de 20 milliards d’euros) ne founit pas les conditions nécessaires pour un développement réussi du programme, d’abord en raison d’un calendrier irréaliste et deuxièmement parce que la nature commerciale du contrat n’est pas adaptée à la réalité d’un programme militaire. » En d’autres termes, EADS est tout à fait prêt à poursuivre le développement de l’A400M mais sous réserves que les clients y mettent du leur, même si ils ont un besoin urgent de remplacer leur flotte actuelle d’avions de transport.

Le dossier de l’A400M est aussi politique. Si le ministre allemand de la Défense, Franz Josef Jung, a une nouvelle fois demandé davantage de « visibilité » afin d’avoir une « présentation plus claire » sur la « manière, la configuration et les délais », son homologue français, Hervé Morin, a de son côté indiqué « tout faire pour sauver le programme » qui reste néanmoins un symbole de l’Europe de la défense. « C’est un programme européen phare, un programme majeur pour l’industrie, un programme extrêmement bien placé et unique dans le monde » a-t-il affirmé ce 30 mars au cours d’un déplacement au camp de Caylus.

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