La puissance militaire chinoise menacerait l’équilibre régional

La Chine n’a pas apprécié le dernier rapport du Pentagone concernant sa puissance militaire, qualifié par le porte-parole de son ministère des Affaires étrangères, Qin Gang, de « grossière déformation de la réalité ». « Ce rapport publié par les Américains continue à jouer sur le faux argument de la menace militaire chinoise » a-t-il encore ajouté.

Gelées d’octobre à février en raison des ventes d’armes américaines à Taïwan, considérée par Pékin comme étant une « province rebelle », les relations militaires entre les deux pays sont en effet loin d’être excellentes et le récent incident en mer de Chine impliquant le bateau américain de recherche acoustique sous-marine USNS Impeccable et des embarcations chinoises n’est pas fait pour arranger les choses.

Pékin a en effet accusé Washington de s’être livré à des activités « illégales » d’espionnage dans sa « zone d’exclusion économique » dans les environs de l’île méridionale de Hainan, où, justement, le document du Pentagone confirme l’existence d’une nouvelle base navale, susceptible d’accueillir la flotte chinoise de sous-marins qui est en plein essor.

« Ce port, qui possède des infrastructures souterraines, fournirait à la marine chinoise un accès direct à de grandes voies maritimes internationales et permet le déploiement potentiel de sous-marins en mer profonde dans la mer de Chine méridionale » estime les auteurs de ce rapport annuel, qui pointe par ailleurs le fait que « l »armée chinoise met au pont des capacités de longue portée dont les implications dépassent Taïwan » et qui « permettraient à la Chine de déployer ses forces pour garantir un accès à ses ressources ou pour faire valoir ses revendications territoriales ».

Plus généralement, le document indique que « les forces armées chinoises continuent de concevoir et de mettre en service des technologies ‘perturbatrices’, notamment dans les domaines nucléaire, spatial et cybernétique, qui changent les équilibres militaires régionaux et qui ont des implications au-delà de la zone Asie-Pacifique ».

Ainsi, parmi les moyens de « perturbation » développés par la Chine figure en bonne place les capacités de nuisances cybernétiques, qui deviennent incontournables dans les conflits modernes, comme les récentes hostilités entre la Russie et la Géorgie l’ont démontré, avec des attaques de sites Internet visant à porter le fer sur le front de l’information.

Suite à la publication de ce rapport, Geoff Morrel, un porte-parole du Pentagone, a souhaité ‘un dialogue militaire plus robuste » et « plus de contacts » avec Pékin dont il a souligné le « manque de transparence » dans le domaine militaire. « Plus nous dialoguons, plus nous avons de chances de comprendre nos intentions respectives, et ainsi de réduire ou d’éliminer de possibles malentendus », a-t-il estimé. Ce à quoi la Chine a répondu à un appel à cesser la publication annuelle de ce rapport  » afin d’éviter de nuire davantage aux relations militaires bilatérales. »

Cela étant, les auteurs du rapport forcent-ils le trait sur la menace que pourrait représenter Pékin? « Pour l’heure, cette montée en puissance de la Chine dans la région s’effectue de manière pacifique, et il n’y a pas de raison de penser que Pékin pourrait souhaiter qu’il en aille autrement dans les années qui viennent » a estimé pour sa part Bruno Tertrais, de la Fondation pour la Recherche Stratégique, dans un essai de prospective concernant l’Asie à l’horizon 2025, publié en novembre 2008.

Cependant, « les risques de crise sérieuse impliquant la Chine proviendront essentiellement de ‘dérapages’ dans un contexte de tensions générées par la compétition politique et économique entre les pays de la région, les contentieux historiques et territoriaux (notamment lorsque l’accès aux hydrocarbures est en cause comme en mer de Chine), le comportement de migrants ou encore l’impact écologique de la croissance chinoise », détaille encore le chercheur. « Dans ce contexte, l’escalade incontrôlée d’une crise à partir d’un incident maritime ou aérien est sans doute le scénario le plus susceptible de générer un conflit impliquant la Chine, conclut-il.

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