La dissuasion nucléaire britannique privatisée

Le ministre de la Défense, Hervé Morin, a souvent justifié la réforme de l’armée française en prenant exemple sur son homologue d’outre-Manche. Cependant, il n’est pas certain que la dernière décision concernant la force de dissuasion nucléaire britannique puisse inspirer, à l’avenir, les responsables français.

Depuis 1963 et la signature d’un accord appelé le Polaris Sales Agreement, révisé en 1982, les Etats-Unis fournissent à la Grande-Bretagne les vecteurs qui équipent les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de la Royal Navy. Ainsi, ces derniers embarquent à leur bord des missiles balistiques mer-sol Trident conçus par la firme américaine Lockheed-Martin, chaque unité coûtant environ 31 millions de dollars.

A la différence de la France, la dissuasion de la Grande-Bretagne n’a pas de composante aérienne et elle ne repose pas uniquement sur des technologies développées au niveau national. Jusqu’à présent, les Britanniques avaient gardé la maîtrise de la fabrication de leurs têtes nucléaires, avec la société AWE Management Ltd. Du moins en partie puisque le capital de cette dernière se répartissait de manière égale entre trois acteurs : l’entreprise britannique Serco, la compagnie publique British Nuclear Fuels PLC et l’américain Lockheed Martin.

Seulement, le gouvernement de Gordon Brown a décidé de se séparer des actions de AWE Management, qu’il détenait via la British Nuclear Fuels, au profit de la société américaine Jacobs Engineering.

Ainsi, la Grande-Bretagne n’a plus aucun contrôle sur la fabrication et la maintenance de sa force de frappe nucléaire, ce qui a suscité la colère des parlementaires de l’opposition conservatrice et centriste, pour qui l’indépendance britannique en matière de dissuasion est menacée, même si le ministère de la Défense (MoD) a assuré que les intérêts du Royaume avaient été préservés dans l’opération.

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