Incident au canal de Suez

Le canal de Suez est un axe stratégique dans la mesure où il permet la circulation entre l’Europe et l’Asie sans être obligé de contourner l’Afrique et de passer le cap de Bonne Espérance. Nationalisé en 1956 par le président égyptien Nasser, le canal fait l’objet d’une surveillance particulière en raison du risque terroriste.

Avec les conflits en Irak et en Afghanistan, le canal est le passage obligé des navires de guerre qui vont rejoindre leur zone de patrouille mais aussi celui des cargos qui transportent l’armement et le matériel pour les opérations des forces américaines et plus généralement, de celles de l’Otan.

Pour cette mission de ravitaillement, l’US Navy affréte des bateaux civils à bord desquels embarquent des militaires pour y assurer la sécurité. Tel est le cas du cargo Global Patriot, appartenant à la société privée Global Container Lines et qui a été au centre d’un incident à l’entrée du canal de Suez lundi dernier.

Le navire était alors en train d’attendre l’autorisation pour entrer dans le canal quand de petites embarcations de vendeurs ambulants s’en sont approchées. Les militaires du bord leur ont intimé l’ordre de s’écarter du cargo et ont ouvert le feu voyant que les esquifs ont continué d’avancer. Seulement, selon les témoins et les autorités égyptiennes, deux personnes ont été blessées et une autre tuée par les tirs américains.

Dans un premier temps, l’ambassade des Etats-Unis en Egypte a nié qu’il y ait eu des victimes par voix de communiqué. Ce dernier, qui évoque les « tirs de semonce » du Global Patriot, précise qu’un « petit bateau a continué de se rapprocher du navire et a reçu deux séries de tirs d’avertissement à 18-26 mètres à l’avant de sa proue. Toutes les balles ont pénétré dans la mer » et de conclure « qu’il n’y a eu aucune victime dans l’autre embarcation. »

Pour l’amiral Gary Roughead, le chef des opérations navales de l’US Navy, l’équipe de sécurité du Global Patriot a « respecté les étapes visant à déterminer les intentions » des embarcations qui s’approchaient du navire avant de déclencher les tirs d’avertissement.

Seulement, l’incident a bel et bien causé la mort de Mohamed Moktat Afifi, un commerçant ambulant et les autorités américaines ne pouvaient que finir par le reconnaître. L’ambassadeur des Etats-Unis au Caire, Francis J. Riccardone, a dû faire volte face en déclarant regretter « des victimes éventuelles », tout en demandant à ce que l’incident soit clarifié « des deux côtés ».

Le département d’Etat, quant à lui, ne cache pas son embarras. Son porte-parole, Sean McCormack a déclaré que les Etats-Unis « ont entamé des discussions de haut niveau pour comprendre ce qui s’est passé et pour s’assurer que nous avons une bonne ligne de communication (avec les autorités égyptiennes), claire et ouverte, pour que ce genre d’incident ne se reproduise pas. »

C’est en tous les cas ce qu’a exprimé le président George W Bush lors d’un entretien téléphonique avec son homologue égyptien, Hosni Moubarak. L’actuel locataire de la Maison Blanche a également exprimé ses « profonds regrets » et présenté ses condoléances à la famille du marchand tué. Cette dernière devrait obtenir une compensation financière de la part du Pentagone.

Du côté égyptien, le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Aboul Gheit, a jugé que cet incident était « inacceptable ». « L’embracation égyptienne s’est peut-être approchée d’une manière qui a inquiété les Américains mais ce n’est pas une raison pour tirer des coups de feu dans les eaux territoriales égyptiennes », a-t-il déclaré au journal gouvernemental Al-Ahram.

Toutefois, et comme l’Egypte est un des principaux bénéficiaire de l’aide fournié par Washington au Proche-Orient, M. Gheit a indiqué que son pays « accepte les excuses américaines », tout en précisant que « les droits du citoyen égyptien doivent être garantis, et le territoire et les eaux de l’Egypte respectés ».

Il reste alors à déterminer si les sommations d’usage ont bien été faites par les militaires de l’US Navy embarqués sur le Global Patriot et si tel a été le cas, pourquoi la barque du marchand tué n’y a pas obtempéré.

Une attaque d’un navire de guerre menée à partir de petites embarcations s’est déjà produite par le passé. En octobre 2000, un attentat de cette nature avait été commis contre l’USS Cole, alors au mouillage dans le port d’Aden, au Yémen. Près de 17 marins américains avaient été tués.

Le Global Patriot, impliqué dans l’incident du canal de Suez (c) Global Container Lines

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