Boeing, mauvais perdant

L’attribution du marché des avions ravitailleurs à l’association EADS/Northrop Grumman aux dépens de Boeing ne cesse de faire des vagues aux Etats-Unis. Au Congrès d’abord, où le président de la Chambre des représentants, la démocrate Nancy Pelosi, a exprimé son scepticisme en déclarant que l’appel d’offres du Pentagone soulevait « de graves interrogations que le Congrès doit étudier attentivement. »

Le choix d’EADS/Northop Grumman a mécontenté, comme l’on peut s’en douter, les élus des Etats où Boeing avait prévu de construire ses B-767 ravitailleurs si l’avionneur avait remporté l’appel d’offres. Le sénateur républicain Sam Brownback, élu du Kansas et membre de la Commission des dotations, a fait part de sa volonté de faire retoquer le financement du contrat. « Je pense que c’est la mauvaise manière de procéder. Je vais me battre contre cela aux dotations », avait-il déclaré. Il pourra compter sur le soutien de Pat Roberts, également élu du Kansas et de deux autres sénateurs, démocrates cette fois, de l’Etat de Washington.

Initialement, Boeing avait obtenu, en 2003, le marché visant à remplacer les avions ravitailleurs KC-135 de l’US Air Force. Seulement, le contrat avait été rompu suite à des irrégularités et à des conflits d’intérêts qui conduisirent deux responsables de Boeing en prison et qui amenèrent le secrétaire à l’Air Force à démissionner de son poste. Cette affaire avait été mise au grand jour par John McCain, le candidat du Parti républicain pour la prochaine élection présidentielle américaine. Les démocrates et les défenseurs de Boeing l’accusent d’ailleurs d’être à l’origine de ce second appel d’offres remporté par EADS et Northrop-Grumman et d’enlever en quelque sorte le pain de la bouche aux ouvriers américains.

L’US Air Force n’est pas épargnée non plus par les critiques, surtout venant de la part de Boeing. Le constructeur l’accuse d’avoir modifié en cours de route les critères concernant notamment la taille de l’avion. En d’autres termes, l’appel d’offres a été, selon Boeing, faussé pour favoriser l’offre d’EADS/Northop Grumman. Et c’est ce qui a motivé, mardi dernier, le dépôt d’une plainte de l’avionneur auprès de la cour des comptes américaine, le GAO (Government Accountability Office).

Le GAO, une instance officielle idépendante, a désormais 100 jours pour étudier le dossier et rendre sa décision. « Nos équipes ont examiné de près la décision sur les avions ravitailleurs et ont trouvé de sérieux manquements dans le processus, qui méritent selon nous de faire appel », a déclaré dans un communiqué le PDG de Boeing, Jim McNerney.

La procédure suspend de facto l’attribution du contrat. Cependant, quelque soit l’avis que rendra le GAO, lé décision finale restera toujours entre les mains du Pentagone.

La décision de Boeing de contester le résultat de l’appel d’offres gagné par EADS et Northorp-Grumman n’est pas une surprise, surtout lorsqu’on considère les 40 milliards de dollars en jeu pour la fourniture de 179 appareils.

En revanche, ce qui peut surprendre, est l’un des arguments avancés par l’avionneur : parce que l’US Air Force est sa cliente depuis plus de 50 ans dans le domaine des ravitailleurs, cela aurait dû lui procurer un avantage décisif sur ses concurrents. C’est un point de vue que Boeing se garde bien de mettre en avant quand il s’agit de conquérir des marchés hors de ses frontières.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]